Entretien avec Emmanuel Dinh, co-directeur du Master 221

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Ancien diplômé du 221 (promo 1999), qu’est ce qui vous plaisait dans la formation et quels en étaient les atouts ? 

La formation, créée par Bernard Castagnède, fête ses 35 ans cette année. C’est le plus ancien diplôme de droit de Dauphine. A l’époque, le « DESS » 221, qui était dirigé par Christine Collette et Jean Prieur, était déjà paré depuis longtemps  des atouts qui ont fait sa réputation d’excellence. Je dirais : une spécialisation en fiscalité de l’entreprise embrassant tout à la fois l’interne et l’international, une équipe pédagogique mêlant universitaires et praticiens, et des étudiants avec des profils divers (juristes, gestionnaires, comptables).

Gardez vous des souvenirs particuliers (camaraderie, professionnels intervenants et enseignants) ?

Bien sûr. Toutes les interventions étaient d’une très grande qualité, et je pourrais citer tous les intervenants. S’il ne devait y en avoir qu’un, je mentionnerais bien sûr Jean-Pierre Gastaud, qui a dirigé le diplôme à partir de l’année suivante avant de prendre les rênes du Master de Droit des affaires de Dauphine (214). Il assurait à l’époque le cours de Fiscalité internationale, discipline qui est devenue ma spécialité. Surtout, il est mon père scientifique, puisque c’est sous sa direction que j’ai effectué ma thèse, et même bien davantage en réalité, puisqu’il est un peu comme un second père pour moi.

Sinon, j’ai rencontré des amis que je continue à voir. Et puis certains camarades de promotion m’ont fait l’amitié d’accepter d’intégrer l’équipe pédagogique, je pense notamment à Edouard Chapelier et Antoine Vergnat. Je n’ai pas suivi l’évolution de tous, mais je sais que chacun a fait une belle carrière. J’indiquerais toutefois qu’à l’époque où j’étais étudiant, l’ambiance était davantage marquée par l’individualisme. Aujourd’hui, les étudiants du master 221 constituent une vraie équipe, très soudée. Il y a un vrai « esprit 221 » : beaucoup de travail, mais aussi beaucoup de solidarité et une grande cohésion. Une autre différence avec cette époque : il y avait une parité de Dauphinois gestionnaires et de juristes, si bien que les étudiants s’orientaient vers les entreprises ou les cabinets dans des proportions assez comparables. Aujourd’hui, la quasi-totalité des étudiants se destine à une carrière d’avocat. Mais le recrutement est toujours ouvert aux étudiants qui ne sont pas de purs juristes, notamment ceux qui sont issus de Dauphine, Sciences Po ou d’écoles de commerce.

De l’élève au maître, vous êtes désormais co-directeur : pourquoi ce choix de vous impliquer dans la formation ? Que-est ce qui vous motive dans cette aventure ?

Après quelques années passées à Nanterre, qui est une très belle Université, où j’ai pu contribuer au développement du droit fiscal, l’occasion s’est présentée pour moi de revenir à Dauphine. Mon collègue et ami Thibaut Massart m’a fait l’honneur et la confiance de me proposer de partager avec lui la direction du master dont il avait la charge depuis 2010. C’est une des plus belles formations de France dans cette discipline, le choix s’est donc imposé avec la force de l’évidence. Ce qui me motive, c’est bien sûr d’améliorer encore le master, avec de nouveaux projets, et de nouveaux défis à relever.

 Selon vous, quels sont à l’heure actuelle les atouts du Master 221 comparé à d’autres formations en fiscalité ?

Je dirais que nous faisons tout pour que le diplôme soit le plus professionnalisant possible. Lorsque nous avons réfléchi aux enseignements, notre démarche a consisté à partir des besoins des cabinets et des entreprises. Notre idée est de fabriquer des fiscalistes directement opérationnels en cabinet ou en entreprise à l’issue de leur formation.

D’où l’idée de multiplier les ateliers pratiques et les mises en situation, au-delà des cours traditionnels, bien entendu nécessaires à l’acquisition d’un socle de connaissances solides. C’est dans cette optique que le « Deal simulation game » a été créé, en partenariat avec STC Partners, consistant pour les étudiants à travailler sur une acquisition de société à partir d’un cas réel. Ils sont amenés à rédiger un rapport de due diligence fiscale ainsi qu’un mémo de structure, présenté aux avocats de STC Partners. Ils ont à leur disposition, pour accomplir leurs travaux, accès à une data room, qui comporte l’intégralité des documents nécessaires. Nous avons également mis en place des simulations de procès, que ce soit avec Eric Ginter (Hoche) en matière de fiscalité européenne, ou avec Philippe Derouin, qui nous a fait l’honneur de rejoindre l’équipe cette année. Et puis il y a bien sûr le « client service tax game » avec EY, qui est une institution du 221. Cet exercice, pensé par Stéphane Baller, existe depuis une dizaine années, et consiste en l’audit fiscal réalisé par les étudiants d’une société du CAC 40, en coopération avec la direction fiscale de l’entreprise, cette année Danone.

La fiscalité transactionnelle a été considérablement renforcée : une centaine d’heures de cours sont désormais consacrées au sujet. C’est un atout car un nombre d’étudiants croissant souhaite s’orienter vers cette pratique. Ainsi, en complément du cours théorique que j’assure sur ce thème, les meilleurs praticiens de la place interviennent sur différents aspects des opérations de M&A. Citons mes amis Stéphane Chaouat (Weil Gotshal), Sébastien de Monès (Bredin Prat), Sabina Comis (Mayer Brown), Pierre Bouley (STC Partners), Emmanuel Delaby (Delaby & Dorison), Edouard Chapelier (Linklaters), Antoine Vergnat (MacDermott). Le « Deal simulation game » évoqué précédemment permet de mettre en pratique tous ces enseignements.

Nous avons aussi renforcé les liens avec les directions fiscales. Juliette Bourgeois (GE), Bérangère Lefebvre (Total), Karine Halimi-Guez (FedEx), Gauthier Halba (JC Decaux) sont toujours dans l’équipe, pour le plus grand plaisir des étudiants. D’autres nous ont rejoints récemment. Virginie Rolgen (Assystem), Jean-Michel Ferragatti (Siemens) et Joëlle Meyer (Publicis), tous les trois d’anciens du 221 !

Les étudiants bénéficient donc de l’expérience d’une équipe pédagogique d’une qualité exceptionnelle, avec le double regard d’avocats et de fiscalistes d’entreprise. Au-delà, le 221 est devenu une véritable marque, synonyme d’excellence, qui se ressource à la force de son réseau, lequel compte nombre de grands avocats fiscalistes et de directeurs fiscaux.

Le Master s’améliore au fil de chaque année, quelles pistes avez-vous en tête pour faire encore mieux ?

Il s’agit avant tout de consolider et d’améliorer les innovations récentes précitées. Je pense qu’il serait bon de consacrer davantage de temps à la fiscalité immobilière, même si Loïc Vedie (Darrois) et, depuis cette année, Olivier Mesmin (Fairway), donnent déjà un bel aperçu de la matière. Il faudrait aussi développer un peu la fiscalité patrimoniale : même s’il s’agit d’une formation en fiscalité de l’entreprise, il est primordial pour les étudiants d’avoir des réflexes patrimoniaux (fiscalité des dirigeants, ISF, apport-cession, pactes Dutreil, etc…).  Il pourrait être utile de créer un véritable atelier en matière de prix de transfert, de façon à ce que les étudiants comprennent, par la pratique, cette spécialité. Enfin, il m’apparaît bon de créer aussi un cours sur le droit pénal fiscal, qui sera sans doute, dans un avenir proche, une niche.

Au-delà, nous souhaitons avec Thibaut Massart développer les aspects internationaux, en augmentant encore le nombre de cours en Anglais, en créant des partenariats avec des universités étrangères, et des accords avec des cabinets dotés de réseaux internationaux pour permettre à nos étudiants d’effectuer leur stage à l’étranger.

Vous exercez également en tant que « of counsel » au sein du cabinet d’avocats STC Partners, qu’est ce qui vous plaît dans cette double casquette enseignant/professionnel ?

Tout d’abord, la liberté que cela me procure. J’ai la chance d’exercer deux professions qui reposent en effet sur ce principe de liberté. Ensuite, même si c’est la même matière, les deux professions n’ont pas la même façon de la travailler. L’universitaire remontera aux grands principes, tandis que l’avocat recherchera la solution concrète à un problème. Il s’agit donc de deux approches divergentes, mais il en ressort, je crois, un enrichissement mutuel. De façon concrète, je dirais que la pratique enrichit mes cours, et que l’expérience de la recherche me permet un certain recul sur les dossiers.

Quels sont les avantages  que cela peut apporter pour la formation du 221?

Plusieurs choses. Tout d’abord, STC Partners est un des principaux partenaires du master : outre le « Deal simulation game », STC est le partenaire de la Revue du Master, qui, depuis l’année dernière, est en langue anglaise. Les associés fiscalistes du cabinet supervisent les articles rédigés par les étudiants. Ensuite, le cabinet prend naturellement des étudiants en stage et en collaboration. Par exemple, un des étudiants de la promotion 2014-2015 a effectué son stage chez STC, et va revenir en tant que collaborateur à l’issue de l’EFB. Entretemps, le cabinet, qui est membre du réseau Andersen Tax, va l’envoyer effectuer son PPI au sein du bureau de New-York. Encore une fois, avec Thibaut Massart, nous souhaitons développer ce type d’initiative, et donner l’opportunité à nos étudiants d’avoir des expériences à l’étranger.

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